QPC : l’absence de plafonnement de l’indemnité d’éviction
En complément de la vidéo où je t’indique comment bien maîtriser les baux commerciaux, étudie bien l’indemnité d’éviction en bail commercial.
Une fois cela réalisé, voici une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) incontournable sur le sujet.
Indemnité d’éviction due au locataire en cas de non renouvellement du bail commercial
Je te fais un point sur la Décision n° 2020-887 du Conseil constitutionnel (QPC du 5 mars 2021)
Quel texte est en jeu ?
L’article L. 145-14 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 18 septembre 2000, dispose que « Le bailleur peut refuser le renouvellement du bail. Toutefois, le bailleur doit, sauf exceptions prévues aux articles L. 145-17 et suivants, payer au locataire évincé une indemnité dite d’éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement.
Cette indemnité comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre ».
Tu imagines que c’est un montant qui peut très vite chiffrer haut… C’est pourquoi un bailleur estime que cela est disproportionné par rapport au préjudice, et il reproche à cette disposition que l’indemnité ne soit pas plafonnée.
(Réflexion personnelle : c’est vrai que c’est source d’insécurité juridique.)
Le bailleur reproche aussi une rupture d’égalité (je n’entre pas dans le détail des arguments, dans un esprit de synthèse, mais tu peux aller lire la décision si cela t’intéresse).
Le Conseil constitutionnel reconnaît qu’il s’agit d’une atteinte au droit de propriété, mais qu’elle est légitime car le législateur poursuit ici un but d’intérêt général, à savoir maintenir la poursuite d’une activité commerciale et artisanale et assurer la viabilité des entreprises.
Le Conseil estime que cette indemnité est encadrée de conditions (que le locataire ait bien exploité le fonds de commerce pendant 3 ans) et encadrée dans son calcul (le préjudice correspond uniquement à la part de la valeur marchande du fonds de commerce perdue).
Photo John Guccione
De plus, le bailleur peut toujours louer son bien ou le vendre, donc l’atteinte au droit de propriété n’est pas disproportionnée.
Le Conseil termine ainsi sa décision : “Il résulte de ce qui précède que les dispositions contestées, qui ne sont pas entachées d’incompétence négative et ne méconnaissent pas non plus la liberté contractuelle ou la liberté d’entreprendre, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution.”
Tu veilleras à bien informer le bailleur si tu as une consultation juridique sur le sujet.